C'est à 22h que Konatsu décida de sortir de son appartement, agrippant vivement son long manteau en drap de laine mauve. Elle venait de terminer l'écriture du deuxième roman de son best-seller à succès et il fallait bien fêter cela par une belle balade nocturne. Cela tombait bien, le ciel était parfaitement dégagé et la pleine lune gouvernait Nekai avec bienveillance.
Konatsu n'était pas sortie seule depuis un bon moment déjà, depuis qu'elle s'était faite agressée par Masakazu, un hybride rebelle du coin. Mais après avoir repris du poil de la bête et retrouvée confiance grâce à l'écriture, plus rien n'allait l'arrêter. Bon, pour autant, la demoiselle n'était pas suicidaire à ce point : un taser - acheté pas plus tard que la semaine dernière - se trouvait dans l'une de ses proches. Et autant dire qu'elle n'hésiterait pas à s'en servir, surtout si un misérable hybride commençait à lui chercher des noises. Avec un peu de chance, peut-être qu'elle croisera un sympathique hunter qui acceptera de discuter un peu en sa charmante compagnie.
Mais point de hunter pour le moment, il n'y avait même pas un chat tandis que Konatsu arpentait confiante son chemin habituel, s’enfonçant de plus en plus profondément dans les bois sombre de Nekai. Et voilà qu'elle s'arrêta net, intriguée par une drôle de présence non loin d'elle. En effet, voilà que trônait une vingtaine de bouquet de chrysanthèmes blancs entourant une simple pierre ovale.
Plus qu'intriguée, Konatsu s'approcha doucement et s'accroupit en retenant sa respiration. Elle prit alors la pierre dans les mains et, voyant une inscription à la craie, ramena le caillou à quelques centimètres de son visage pour y voir ce qui y était écrit. Une fois sa lecture accomplie, son coeur cessa un instant de battre et la demoiselle reposa la pierre puis se releva avec hâte.
"Personne ne mérite d'être oublié, repose en paix - Masakazu", voilà des mots qui firent frémir d'effroi Konatsu. La peur se transforma vite en colère, si bien que l'humaine ferma les poings et repensa aux événements qui s'étaient déroulés ici quelques mois plus tôt.
Shiryu avait été un hybride chien plus qu'exemplaire, ne cessant de se montrer gentil envers tout le monde et faisant le bonheur de ses parents. Konatsu, ne supportant pas d'être laissé de côté par l'amour de ses géniteurs, amena l'animal chez elle et lui infligea d’innombrables tortures, ce qui lui inspira la trame principale de son roman. Et puis, un jour, son père avait trouvé le pot aux roses et, lors d'un accident de voiture, perdit la vie. Sa mort avait énormément bouleversée Konatsu, surtout parce qu'il avait découvert à quel point un monstre cruel se cachait sous les traits faussement innocents de sa fille aînée. Bref, histoire de se défouler, la jeune femme avait amené Shiryu dans les bois et l'avait frappé à mort, ici, juste là. Oui, l'albinos se souvenait encore du contact du simple bâton en bois qui lui avait permis d'ôter la vie au pauvre hybride.
Forcément, Masakazu en avait profité pour faire son intervention à ce moment là, la menaçant et depuis, elle ne l'avait plus jamais recroisé, préférant s'enfermer dans son appartement, jusqu'à aujourd'hui. Jamais elle ne s'était imaginé à quel point Masakazu défendait les hybrides domestiqués. C'en était presque touchant si Konatsu ne trouvait pas ses créatures tellement écœurantes.
Tout ça pour dire que Konatsu ne se sentit plus du tout d'humeur à se balader à cet instant précis et, au lieu de prendre le risque de se faire bêtement submerger par ses émotions, la jeune femme fit faire demi-tour à ses bottes à talons haut en cuir blanc et fit quelques pas en avant. C'est alors qu'elle entendit comme un craquement et se figea à nouveau net. Son rythme cardiaque à nouveau malmené, la demoiselle n'en tenant plus et s'écria d'un ton ferme :
- Qui va là ?! Montrez vous immédiatement !
Nerveuse, Konatsu eut un mal fou à se rassurer, s'imaginant déjà qu'un hybride en quête de vengeance allait à nouveau s'en prendre à elle. Alors, sa main ne tarda pas à venir s'immiscer dans sa poche, caressant vivement le taser du bout des doigts, prêt à le dégainer d'une minute à l'autre si il le fallait.
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