Des révélations en ébullition ! - ft Ezekiel

Révélations en ébullition

Serrée contre ma volonté telle un banal ours en peluche par mon maître finement éméché, j'avais eu pour projet de m'enfuir de ses bras aussitôt qu'il serait endormi assez profondément. Seulement, je n'avais pas soupçonné que je le serais avant lui. Dialoguant avec moi-même pour faire passer le temps, ou parce que les questions s'imposaient à moi sans que je ne puisse y changer quoi que ce soit, j'avais fini par m'assoupir doucement. Je me sentais plutôt bien, le son de sa respiration tout près de mon oreille me rappelait l'époque lointaine où je dormais avec ma mère dans notre petite chambre chez notre premier maître. L'époque où j'étais encore insouciante, un peu sauvage, et où j'avais des rêves plein la tête. Un temps bien révolu, malheureusement...
Je m'étais assoupie sans même m'en rendre compte, petit à petit je m'étais juste sentie comme si tout autours de moi n'était que du coton doux et chaud. Je n'aurais pas songé que je finirais par faire un cauchemars... Mon environnement de coton s'était petit à petit transformé en notre maison. On sonnait à la porte, je descendais les escaliers -que faisais-je en haut, d'ailleurs? Je n'y allais presque jamais!- pour aller ouvrir, vêtue d'une robe blanche -du blanc? Je n'en porte quasiment plus non plus... Ma seule robe blanche étant celle que j'avais en arrivant ici-. J'ouvrais la porte et ne vis personne mais, étrangement, quelque chose m'appelait à l'extérieur. Je sortais sans même mettre de chaussures ou refermer la porte derrière moi et marchait jusqu'au parc, comme hypnotisée. Les cerisiers avaient perdus leurs fleurs et à quelques mètres devant moi se tenait Kôsuke, mon précédent maître qui s'était joué de moi... Tremblante dans la réalité comme dans mon rêve, je voulus me rapprocher le plus possible de cette présence chaleureuse qui me rassurait: Gabriel. C'est alors que, dans mon rêve, je tournais les talons, le vit derrière moi et nous rentrions à la maison. Moralité: les fantômes de mon passé me suivrons toujours, mais j'avais à présent un endroit où aller et quelqu'un à qui faire confiance. Encore endormie, j'ignorais que c'était contre lui que je me serrais... Nul doute que, si je l'avais su, je ne l'aurais pas fait!
Gabriel avait tenté de se lever sans me réveiller mais, manque de chance pour lui, quand on vit une vie de rebelle on apprend à avoir le sommeil léger et cela n'avait pas encore eu le temps de me quitter! Enfin, je ne m'étais pas réveillée tout de suite à vrai dire. Lorsqu'il s'était déplacé, j'avais senti le corps qui me servait d'appui "disparaître" et avait tenté de m'y agripper mais n'avais rien saisi d'autre que de l'air. Alors que la douce chaleur qui m'enveloppais jusque-là disparaissait complètement, et que lui sortait de la chambre, j'avais grommelé comme un enfant qu'on essaie de réveiller pour aller à l'école un lundi matin puis avait commencé à me frotter les yeux. Lorsque je me redressais pour regarder autours de moi, il n'était déjà plus là.
Je mis un instant à me remettre en mémoire le déroulement de la soirée et le pourquoi de sa présence dans mon lit... Je jetais un oeil à mon réveil. Nous nous étions couchés au alentours de 23h et il était à présent un peu moins de cinq heure du matin. D'ordinaire, je n'étais pas encore couchée à cette heure! Je repensais à toute cette soirée et les questions se remirent à fuser dans ma tête, mais ce n'était pas vraiment le moment... Je m'asseyais sur le lit et dressais l'oreille afin d'essayer de savoir ce que faisait Gabriel. J'entendis du bruit provenant de la salle de bain et conclus qu'il était simplement allé aux toilettes. La question était qu'allait-il faire ensuite. Vu l'heure, je supposais qu'il irait se recoucher dans son propre lit, après tout il pensait sans doute que je dormais encore et il était un peu tôt pour discuter... Je n'osais pas me manifester, préférant attendre de voir ce qu'il ferait. Si il retournait se coucher j'en ferais de même et nous parlerons au petit déjeuner.
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Suis-je une hybride cliché...?

J'étais assise sur mon lit, les yeux dans le vague, les cheveux un peu en pagaille. Mon esprit, encore embrumé par le sommeil, se remplissait déjà de questions auxquelles je n'avais pas la réponse. Devais-je me recoucher et faire comme si de rien était? Après tout il n'était même pas cinq heures et, très franchement, je doutais de notre capacité de parler de cette soirée à une heure pareille... Je m'apprêtais donc à me remettre au lit comme si rien de tout ça n'était jamais arrivé, lorsque la porte de ma chambre s'ouvrit à nouveau, doucement, comme pour ne pas me réveiller bien que je le sois déjà. Gabriel avait manifestement entrepris de faire comme si il ne s'était pas levé, sauf qu'il n'avait pas prévu que je sois réveillé et qu'il eu donc à me demander la permission avant de revenir se coucher. Pourquoi, d'ailleurs? Maintenant qu'il tenait bien sur ses deux jambes il aurait pu monter les escaliers et aller se coucher dans sa chambre, sa demande était donc assez surprenante. Moi qui pensait plutôt qu'il allait continuer de jouer la carte de la discrétion et aller se coucher dans son lit pour qu'à mon réveil je ne sache plus si cette soirée avait été réelle ou juste un rêve, pour ne pas avoir à en parler... Quelque part, en revenant ici, il affrontait ses responsabilités par rapport à ce qu'il s'était passé. Oui, certes, mais il revendiquait aussi qu'il pensait tout ce qu'il avait fait et dit lorsqu'il était ivre. Ce qui était un délire d'homme saoul devenait tout à coup une volonté consciente... Donc tout était vrai. Je ne m'en remettais pas, moi qui me répétait que tout cela n'était que bêtise pour me rassurer. Peu être que je me faisais juste des films, mais même en me disant cela je me trouvais confrontée à un conflit avec moi-même puisque cela signifiait que je voulais inconsciemment que ce soit vrai! Ah, ce raisonnement allait décidément bien trop loin! Mes joues se firent roses mais la pénombre l'empêcha de le voir -fort heureusement pour moi, d'ailleurs!-. Qu'est-ce que j'allais bien pouvoir lui répondre? Si je disais oui, il penserait que j'avais apprécié de dormir avec lui... Ce qui concrètement était vrai puisque j'avais très bien dormi mais je préférais qu'il ne le sache pas pour éviter qu'il en tire des conclusions hâtives! Si je disais non, il pourrait penser que je suis fâchée contre lui à cause de son comportement et cela risquait de le blesser alors que j'avais tout fait pour éviter ça durant la soirée! Bon sang, on en serait pas là si je ne m'étais pas endormie au lieu de m'enfuir!
- Euh... Tu peux venir, si tu veux... Bredouillais-je sans trop savoir moi-même ce que je disais. Je m'aperçus alors que j'étais encore toute habillée. Laisse-moi juste le temps de me changer.
J'attendis qu'il sorte, sans doute parti en faire de même, pour me lever. Et zut! J'avais dit oui, aurais-je dû dire non plutôt? Enfin, concrètement je lui avais laissé le choix alors c'est lui qui avait dit oui et pas moi! Oh, c'était trop compliqué! Concentrons-nous sur notre activité principale: se changer. Je retirais mes bas, ma robe et surtout mon soutien-gorge qui était terriblement gênant pour dormir!
Puis je déposais le tout sur la chaise qui se trouvait à coté de la commode et me dirigeais vers l'armoire pour y chercher un pyjama. Je me souvenais alors qu'ils étaient à l'heure qu'il était dans la machine à laver que j'avais oublié de mettre en route dans la journée à cause de ma migraine. Il ne me restait qu'une nuisette en satin que je gardais pour l'été, quand il ferait trop chaud pour porter un pyjama... Tant pis, de toute façon ça ou une robe comme celle que je portais avant, quelle différence?
J'essayais de me garder de toute arrière-pensée, cela n'avait pas lieu d'être entre nous, enfin! Pensais-je en m'arrêtant devant le grand miroir qui trônait à coté de l'armoire. Je n'étais pas le genre d'hybride cliché qui tombe amoureuse de son maître. De toute façon, même si je le voulais, je ne devais pas être franchement son genre... Je restais un instant devant le miroir, en petite culotte,
à me contempler. Même sur la pointe des pieds j'étais toujours plus petite que l'autre fille, et puis j'avais la poitrine et les hanches bien moins généreuses, ... Enfin, de toute façon je n'avais aucune raison de me comparer à elle. Comme toutes les filles, j'avais élaboré vers 12 ou 13 ans le profil du garçon dont je serais amoureuse quand je serais plus grande. Evidemment il ne s'agissait que d'un idéal de gamine et j'avais fini, avec le temps, par penser qu'un type pareil n'existait pas. Je ne demandais pas qu'il soit hybride ou humain -oui, enfant, je me croyais capable de sortir avec un humain ce qui avait fini par me passer après avoir été confrontée aux pires énergumènes- mais qu'il soit capable de voir au delà de ça, qu'il me voit comme une femme et non comme une hybride, le paradoxe était que je voulais aussi qu'il ne soit pas rebuté par mon espèce mais qu'il la trouve belle...
Alors que plus tôt je lui demandais de ne pas s'en soucier. Je voulais aussi bien évidemment qu'il m'écoute et me comprenne, ce qui n'était pas évident quand on était une vulgaire hybride domestique, et aussi qu'il me fasse rire: que les journées ne soient pas ennuyeuses en sa compagnie... Et encore deux ou trois autres critères dont je ne me souvenais plus. A l'époque, je devais lire trop de romans pour fille. Pourtant, en y réfléchissant, Gabriel ne me voyait pas comme une simple hybride de maison, et il avait dit lui-même ne pas être dégoutté par mes gênes de chauve-souris, ce soir il m'avait prouvé qu'il écoutait toujours ce que j'avais à dire et puis il fallait avouer que nous nous amusions bien tout les deux... Mais ce n'était pas pour autant que je devais en tirer des conclusions! Peu être qu'il lui manquait les deux ou trois trucs que j'ai oublié... Et puis de toute façon,
ce n'était que les mots d'une gamine! Le visage rougissant, j'enfilais ma nuisette, remis de l'ordre dans mes cheveux et allait ouvrir la porte pour qu'il puisse entrer lorsqu'il le voudrait.

Suis-je une hybride cliché...?

Toujours dans une obscurité quasi-totale qui ne constituait en rien une gêne pour moi, j'étais retournée dans mon lit, faisant mine de ne pas particulièrement attendre l'arrivée de Gabriel. Après tout, maintenant qu'il était remonté dans sa chambre, libre à lui de redescendre ou pas. Je me promettais de ne me formaliser ni si il revenait ni si il décidait de rester en haut: si il revenait ce serait juste parce qu'il m'avait dit qu'il le ferait et si il choisissait de rester en haut c'était parce que son lit devait forcément être plus confortable que le mien, surtout si en plus il s'agissait de le partager. Cela n'avait rien à voir avec une quelconque tension entre nous! Ce ne serait pas bon de penser qu'il puisse avoir ce genre de tensions... Ou n'importe quel autre genre, d'ailleurs! Nous étions... Maître et hybride? Pas vraiment... Amis? Ce serait présomptueux de ma part... Colocataires, tout au plus... Si on omettait le fait que je ne payais pas de loyer! L'attente -durant laquelle je tentais de me persuader que je n'attendais rien tout en étant incapable de m'endormir sans savoir- me parut interminable. Je m'étais allongée sous la couverture, dans la position la plus confortable possible, et essayait en vain de trouver le sommeil.
J'entendis finalement la porte s'ouvrir une dernière fois... Il avait donc décidé de venir. Je ne savais pas si je m'en réjouissais ou si je trouvais cela étrange. Mais, pourquoi m'en réjouirai-je, après tout? J'ouvrais les yeux et le vis tenter de rejoindre le lit dans le noir. Oups, j'avais tendance à oublier que j'étais la seule à avoir la vision nocturne! Il m'indiquait alors qu'il ne me voyait pas et faisait de son possible pour ne pas m'écraser, sur un ton qui se rapprochait de la plaisanterie et ressemblait d'avantage à ce dont j'avais l'habitude! Quelque part, cela me rassurait.
- Ah, je n'échangerais ma vision nocturne contre rien au monde! Me moquais-je à mon tour, non seulement parce que c'était bien pratique et parce que cela me permettait de le voir galérer!
Parler à voix basse dans le noir rendait cette situation un peu trop intime à mon goût... Je ne pensais qu'à vite dormir avant que le moindre fait et geste ne devienne gênant. Je me fis toute petite dans un coin pour le laisser passer puis repris ma position initiale. Et maintenant? Je dis bonne nuit ou je me contente de me rendormir comme si de rien? ... Trop de questions!

Suis-je une hybride cliché...?

Nous y voilà, ce n'était pas si terrible finalement -tentais-je de me persuader-. Nous étions tous les deux dans le lit, gardant au maximum nos distances, évitant soigneusement tout contact physique... Aurais-je peu être dû dire non? Aurait-il mieux fait de rester en haut? Il était un peu tard pour se poser ces questions. Tout ce que nous pouvions faire, maintenant, c'est dormir. De toute façon, cela n'engageait en rien... N'est-ce pas? Nous allions juste dormir, au matin on prendra un petit déjeuner, on rangera la cuisine et puis il ne restera plus de traces de cette soirée chaotique. Était-il nécessaire de s'expliquer? -Il était évident que oui mais je tentais me convaincre du contraire-. Un silence pesant s'installait, plus rien de bougeait. Un malaise ne tarda pas à suivre... Je cherchais le sommeil, comme pour m'empêcher de penser. Je comptais les secondes en pensée, cela avait quelque chose de rassurant. La voix de l'humain finit par se faire entendre, brisant le silence.
- Bonne nuit... Répondis-je à mon tour.
Le temps allait être long avant que le matin ne vienne. Je ne parvenais pas à fermer l'oeil. Alors que je m'étais endormie si facilement tout à l'heure, voilà que je n'y arrivais plus! Je réfléchissais. Pour ne pas penser à lui et à cette proximité très embarrassante, je repensais à ce que nous disions la veille: à ce que je voulais faire de ma vie maintenant. En effet, je m'étais tout de suite mise en place d'hybride de maison en arrivant ici: j'étais plus ou moins cloîtrée ici lorsqu'il était au travail puisque je ne sortais en journée que quand c'était vraiment nécessaire, lorsque j'étais seule je n'avais pas grand chose d'autre à faire que ranger la maison, faire la cuisine, lire des livres et regarder la télévision... Mais je n'allais pas me contenter de ça toute ma vie. D'autant que rien ne m'obligeait à le faire! Je le faisais parce que j'en avais le temps, parce que je ne savais pas quoi faire d'autre, et parce que je songeais au fait que si je ne le faisais pas ce serait à lui de le faire et que ses journées étaient déjà bien chargées! Quelque part je me demandais comment il s'en sortait avant que j'arrive, surtout quand je le voyais s'endormir sur le canapé à peine rentré du travail comme l'autre jour! J'avais presque eu envie de lui faire un câlin à ce moment-là... D'ailleurs je le pouvais maintenant, mais... Non! Voilà que le sujet revenait de lui-même. Je grimaçais en essayant de me retirer cette idée de la tête. Penser à autre chose... Je devais penser à autre chose!
J'énumérais toutes les choses auxquelles je pouvais penser pour occuper mon temps en espérant que le sommeil vienne de lui-même... Mais tout me ramenait forcément à l'instant présent. J'essayais alors de ne penser à rien. Je pris une grande inspiration puis je m'imaginais projeter toutes les idées qui me dérangeaient loin de moi en expirant. Loin... Très loin... Puis je me remettais à compter les secondes, pourquoi avais-je arrêté d'ailleurs? Petit à petit je commençais à avoir envie de dormir, voilà donc une technique qui fonctionne! Je ne me souviens plus de ce dont je rêvais, enfin c'est ce que je prétendrais si vous me le demandez. A vrai dire ce n'est pas le genre de rêves dont on est très fier et qu'on a envie de raconter à tout le monde... Il paraît que cela ne veux rien dire, mais je pense que celui-là a clairement été inspiré par l'interprétation faite par mon cerveau malsain de la situation dans laquelle nous étions. Enfin! Je ne vais pas insister! C'était un rêve, point.
Un rêve dont j'émergeais tout doucement...

Suis-je une hybride cliché...?

J'émergeais doucement, et mon cerveau s'efforçait de faire la part des choses entre la réalité et le rêve. Autant j'étais sure de la place chronologique de certains événements, autant d'autres me laissaient perplexe. Je me redressais sans geste brusque puis me retournais pour remarquer l'absence de l'humain à coté de moi... Sans doute était-il déjà réveillée. En concentrant mon attention je pouvais entendre un léger bruit venant de la cuisine. Je me levais et tirais les rideaux afin de laisser passer un filet de lumière juste suffisant pour me permettre de discerner les couleurs et ainsi choisir une tenue harmonieuse sans pour autant me brûler les rétines. Etre nyctalope avait beau être pratique, la photosensibilité était loin d'être un avantage! Je m'éloignais de la fenêtre pour rejoindre l'armoire, que je commençais à fouiller en quête d'un vêtement qui me parle. Typiquement un truc de fille, me direz-vous! Mon regard déviait pour s'attarder sur mon reflet dans le miroir, précisément celui de ma tignasse: à la lumière je constatais qu'il était temps de laver mes cheveux... La toilette allait donc être plus longue que prévue. Que faire? Rejoindre Gabriel à la cuisine d'abord ou aller prendre une interminable douche avant? J'avais cette obsession de vouloir toujours être présentable, de refuser d'être vue temps que je n'étais pas bien propre, coiffée et maquillée... Mais d'un autre coté nous vivions ensemble alors un jour ou l'autre il finirait par me voir les cheveux en bataille! Mon ventre qui grondait me fit comprendre que la priorité était de prendre un petit déjeuner... Voilà qui était dit! J'improvisais une queue de cheval -un peu tordue- et enfilait une robe de chambre qui m'arrivait au niveau du genou histoire de ne pas sortir de ma chambre en petite tenue -voilà qui serait indécent- et faisait ma petite entrée dans la cuisine, entrée qui n'avait rien à envier à celles des plus grands top-model!
- Bonjour... Fis-je en me frottant l'oeil.
Sur le coup, je me sentais un peu honteuse: c'était bien la première fois que je me montrais à qui que ce soit dans cet état -même à la ville souterraine je m'arrangeais toujours pour ne pas sortir de ma cabane temps que je ne me trouvais pas jolie!-. Je jetais un coup d’œil alentour pour constater:
- Ah, tu as fait la vaisselle. Il fallait pas, c'est moi qui ai tout laissé traîner...
Même si, concrètement, j'avais tout laissé traîner pour m'occuper de lui parce qu'il avait trop bu... Mais passons. Je me servais un verre du jus d'orange tout en regardant en direction de la fenêtre: il faisait un temps plutôt nuageux aujourd'hui, le genre de journées que j'appréciais car je pouvais sortir sans trop craindre la migraine. Peu être une occasion d'aller explorer le jardin, plus tard. Pour l'heure c'était petit déjeuner. J'étais mi-calme olympien mi-tête dans les nuages. Mes questions? J'espéraient qu'elles aient disparu dans mon sommeil mais il n'en était rien, je cherchais le bon moment pour les poser mais quelque chose me disait que le bon moment ne viendrait jamais.

Il faut qu'on parle!

Le matin ne me réussissait pas vraiment, il fallait dire que mon absence totale de rythme de vie ne me rendait pas le réveil facile: tantôt nocturne, tantôt diurne en fonction des besoins de la maison et de ce que je voulais faire de mon temps... Si je ne me fixais pas des heures de sommeil, mon corps allait sans doute s'épuiser, mais pour l'instant cela ne se manifestais que par un réveil particulièrement difficile. A mon sens, il était trop tôt pour se poser des questions, ma conscience était encore dans mon lit. Machinalement, je remplissais la bouilloire électrique d'eau pour préparer mon thé du matin: un rituel dont je ne pouvais tout simplement pas me passer -et oui, c'est possible de faire du thé dans la ville souterraine, vous voulez vraiment que je raconte comment l'Homme a apprivoisé le feu et ce qu'il se passe quand on met de l'eau dessus?-. Mon regard se posait sur la quantité de nourriture disposée sur la table: mon maître était-il devenu un ogre? Allais-je faire une blague? ... Pas le moment. Il ne semblait pas disposé à m'écouter, lui aussi avait l'air ailleurs.
Je m'asseyais en face de lui et buvais mon verre de jus d'orange, le regard perdu dans la baie vitrée. Gabriel sortit alors de son silence pour s'excuser de son comportement de la veille: je pouvais assez facilement comprendre que ses journées étaient longues, que la fatigue accélère les effets de l'alcool, ... C'était plus les choses qu'il avait dit qui me bousculaient un peu... J'avais passé la nuit à y penser, à essayer de me persuader qu'il ne les pensait pas par peur que les choses changent, plus j'essayais d'oublier plus j'y pensais à la fin du compte. Je manquais de m'étouffer lorsque j'entendais l'humain me qualifier de "fille très sexy"... Soit il n'avait pas fini de dessaouler, soit c'était une mauvaise blague et je ne trouvais pas ça drôle du tout! Il poursuivait, parlant à toute vitesse comme pour clore le sujet rapidement, par expliquer qu'il s'était senti bien avec moi et que c'était pour ça qu'il avait choisi de revenir ce matin... Mais comment j'étais censée le prendre, ça?! Personne ne m'a jamais dit un truc aussi gênant! Enfin, sans doute parlait-il sans ambiguïté et c'était juste mon esprit malade qui... Ah, je ne voulais pas savoir! Enfin si! Enfin non! ... Je restais figée quelques instants, incapable de bouger ou de répondre, comme si tout mon esprit était trop occupé par ces questions pour me donner la capacité de faire autre chose. On entendait plus que le bruit de l'ébullition de l'eau dans la bouilloire. Je clignais des yeux pour revenir à moi, achevant la préparation de mon thé toujours aussi machinalement.
- Je... Je ne t'en veux pas, tu aurais autant de raison que moi d'être fâché... Mais je t'avoue que je ne savais pas trop sur quel pied danser hier soir, j'ai essayé de ne pas trop te brusquer en pensant que ce n'était pas une bonne idée dans ton état et puis... J'étais un peu troublée par ce que tu racontais...
Troublée, c'était le mot. Je ne savais pas quoi en penser, et je détestais ça!
- Enfin bref. En me levant j'espérais que ça n'est pas trop de conséquences mais manifestement c'est raté... La preuve: tu regardes ailleurs quand tu me parles et tu as oublié de faire une blague sur ma tenue. Je n'ai pas envie qu'on s'évite toute la journée voire toute la semaine ou plus encore! ... Je préfère qu'on parle franchement, même si c'est compliqué...
Ça l'était de toute évidence pour moi aussi, mais je préférais cela que de garder cette gêne constante entre nous alors que nous nous entendions si bien...

Finalement, c'était une mauvaise idée...

J'avais juste eu le temps de dire "parlons franchement", que déjà je le regrettais. Je songeais au fait que j'allais moi aussi avoir à m'exprimer et que je me sentirais sans doute bête si je lui racontais toutes les histoires que je me faisais dans ma tête et qu'il me disait que je me trompais complètement! Non, vraiment, j'aurais peu être mieux fait de répondre "d'accord" et de laisser les choses se tasser naturellement, comme ça le sujet était clos et je n'aurais eu qu'à me forcer un peu mieux à oublier... Mais bon, maintenant il était trop tard pour revenir sur ce que j'avais dit. Je me concentrais sur la préparation de mes tartines, comme pour avoir un support sur lequel me focaliser au cas où il disait quelque chose d'embarrassant. Déjà, je le voyais se forcer à regarder dans ma direction, puis il commençait à essayer d'expliquer, c'était compliqué sans l'être mais pourtant ça l'était quand même... Enfin. Il disait que j'étais une fille charmante mais... Je le voyais se gratter la tête, au fil de la semaine j'avais remarqué qu'il faisait ça quand il réfléchissait... Mais au début il n'y avait pas prêté attention, c'était en apprenant à me connaître qu'il s'en était rendu compte. En clair, quelque part, il était attiré par moi. J'avais l'impression que mon visage chauffait. Il était bien en train de dire ce qu'il avait l'air de vouloir dire? Voilà qu'il me regardait dans les yeux, il fallait que j'ai l'air naturelle... Naturelle! ... C'était peine perdue, manifestement.
Mais il fallait qu'il y ai un mais... Apparemment tout ça était un problème. Comment le fait de s'intéresser à moi consistait en un problème? Il n'avait pourtant pas l'air du genre à se soucier de la différence humains-hybrides ou même vraiment de ce qui pourrait se dire sur lui... Je n'eus pas le temps de me poser trop cette question que déjà il y répondait: il ne voulait pas abuser de son pouvoir sur moi, passer pour un maître profiteur de plus à ajouter à mon CV. Il s'excusait de ce qu'il qualifiait de "moment de faiblesse" et me promettait de ne pas me toucher... Je... Ah, quelque part, je ne sais pas pourquoi, je lui en voulais! J'avais une envie folle de montrer les crocs, de lui faire comprendre que moi aussi je pouvais avoir mon avis sur la question! Vraiment... Il coupait tout simplement cours à toute discussion. Mes questions n'avaient plus besoin de réponse: même si il avait vraiment voulu m'embrasser, on s'en fichait puisqu'il ne le ferait jamais. Pas que je me plaigne mais... J'aurais aimé qu'il me demande ce que j'en pensais -... ou peu être pas, en fait?-. Lui qui disait qu'il ne changerait pas d'avis sur moi après avoir appris mon histoire, que ça ne changerait rien, voilà qu'il ne voulait pas être un énième profiteur. Il n'était qu'un menteur, un menteur doublé d'un lâche! Je ne comprenais pas pourquoi cela me faisait autant de bien de l'insulter dans ma tête... Mais cela m'en faisait et c'était suffisant. Il fallait que je lui réponde. Qu'allais-je faire? Lui dire quelque chose qui le mettrait autant en rage que moi en ce moment? Me contenter de faire comme si de rien était? Je pouvais aussi lui hurler que je n'étais pas d'accord et le mettre au défi de m'embrasser et qu'on en finisse mais... Non. Pas une bonne idée. Je buvais mon thé, m'efforçant de garder l'air calme tout en cherchant mes mots. Je fis alors quelque chose qui ne me plaisait pas, mais qui me semblait le plus raisonnable: mentir.
- Ne t'en fait pas, quand je dis que j'étais troublée... C'est juste que je n'ai pas l'habitude de ce genre de choses... D'autant que cela me paraissait étrange au vue de ce qui m'avait semblé être ton genre de filles. Ça, c'est envoyé! Ça t'apprendra à me faire tourner en rond pour finalement me dire de tout oublier! Quoi qu'il en soit, je comprends ta décision et je la respecterais. Mais rassure-toi, te servir de moi comme doudou ne suffit pas à faire de toi un mauvais maître.
Respecter sa décision? Mon oeil! J'avais bien envie de la lui faire regretter! Je terminais ma tasse de thé et mangeais ma tartine avant de me lever.
- Je dois vraiment prendre une douche, je ferais la vaisselle du petit déjeuner après si ça ne te dérange pas. Expliquais-je.
J'avais aussi besoin d'être seule pour assimiler toutes ces informations... Puis m'efforcer de toutes les oublier. Maudits humains.

Tu ne peux pas résister!!!

Je n'étais pas très fière de moi et de mon mensonge... J'avais menti lorsque je disais que je comprenais son choix, mais aussi lorsque j'assurais que ses propos ne m'avaient troublés que parce que je n'avais pas l'habitude qu'on me drague et que je ne m'y attendais pas. Moi qui avait juré de toujours être honnête avec lui, il n'y avait pas de quoi se venter... Mais lui aussi m'avais menti hier, juste retour des choses! Ce que je nommais "mensonge" me mettait en colère: il ne voulait pas tenter de se rapprocher de moi parce qu'il avait peur de passer pour un profiteur? Aurait-il pu dire ça si il n'avait pas connu mon passé? A vrai dire il ne savait pas tout, mais déjà suffisamment pour savoir qu'il n'arriverait jamais à la cheville de ceux qui m'avaient blessés auparavant. Qu'il me drague, cela me faisait moins peur que de me faire presque couper les ailes ou de manquer d'être prêtée comme une vulgaire marchandise... A vrai dire j'avais presque envie qu'il le fasse. Mais qu'est-ce que je raconte? ... Non! Je n'irais pas jusque-là! Enfin... Peu être. Bref, j'étais vexée: on ne fait pas un tas de compliments à une fille pour finalement lui dire... Ça. Quelque part, j'étais blessée dans mon égo... Et jalouse de toutes ces filles humaines à qui ce genre de problèmes n'arrivaient jamais. Alors quoi? Il allait éviter scrupuleusement tout contact physique et me traiter comme une bonne soeur sous prétexte qu'il était mon maître et qu'il "ne voulait pas profiter de la situation"?! Ah, on allait voir qui regrette ses décisions! Je n'aime pas qu'on me résiste!
Je me sentais presque coupable de lui avoir menti lorsqu'il disait être content que je comprenne... Mais c'était tant pis pour lui, il l'avait fait en premier. Je me dirigeais donc vers ma chambre, attrapait dans ma penderie une robe noire ornée de dentelles de couleur rouge sombre ainsi qu'une paire de bas noirs et allait m'enfermer dans la salle de bain.
Je détachais mes cheveux, retirais mes vêtements et entrais dans la douche. Première étape: régler l'eau! C'était toujours trop froid au début, puis trop chaud, il s'agissait de trouver le juste milieu et ce n'était jamais du premier coup. Une fois cette étape passée, je restais un moment sous l'eau qui coulait... Je ne regrettais pas les douches à l'eau froide de la ville souterraine! Je me saisissais ensuite de mon shampoing pour faire mousser mes cheveux avant de les rincer méticuleusement pour y appliquer un soin que je laissais reposer pendant que je me lavais. Je m'étonnais de la douce odeur sucrée du gel douche: c'est fou comme, quand on est une fille, on se sent obligée de sentir le bonbon ou le fruit tout le temps... Enfin, ce n'était pas plus mal. Au fur et à mesure, j'avais l'impression de me calmer: prendre une douche avait cet effet reposant sur moi. Pour autant je n'étais pas débarrassée de tous mes questionnements. J'étais partagée entre "si il ne veut rien tenter c'est peu être qu'il ne me mérite pas" et "si tu ne veux pas essayer, c'est moi qui vais le faire!". Mais, enfin, pourquoi je voudrais faire quelque chose? Je tentais de me sortir cette idée de la tête mais elle restait solidement accrochée. Non, j'ai dit non! Je ne peux pas assumer de vouloir draguer mon maître... Même si il ne se comportait pas vraiment comme tel... Enfin... Je voulais juste lui faire regretter de ne pas m'avoir demandé mon avis, ça ne voulait pas dire pour autant que je tombais amoureuse de lui ou je ne sais quel autre sens on pourrait donner à cette démarche! Zut alors!
Je sortais finalement de la douche, à peine séchée, j'appliquais une crème sur tout mon corps et un soin sur mon visage. J'avais envie d'être parfaite, juste pour l'énerver. Juste pour lui dire "voilà à coté de quoi tu passes, espèce de lâche!"... Même si je n'aurais jamais le courage de lui dire ça. Je passais les vêtements propres que j'avais apporté et me retrouvais devant le miroir. Je rinçais le soin sur mon visage et le troquais contre une crème hydratante. J'optais pour un maquillage léger: nous étions dimanche, je ne sortais pas avant au moins ce soir et je ne voulais pas qu'il aie des soupçons. Je mettais donc juste un peu de correcteur pour mon teint -avec ma peau parfaite, on peut se le permettre -, du mascara et un brillant à lèvres assez discret. Ensuite, je brossais mes cheveux. Comment allais-je me coiffer aujourd'hui? Il fallait quelque chose que je ne faisais pas tous les jours mais sans ressembler à une star de cinéma non plus... J'optais pour une tresse en épis que je mis une éternité à faire du fait de la longueur de mes cheveux -ce qui me faisait comprendre pourquoi je ne le faisais pas tous les jours-. Après avoir observé mon reflet dans le miroir et m'être convaincue d'être parfaite, je sortais de la salle de bain. Après un bref tour du salon, je concluais que mon maître devait être soit dans sa chambre soit sorti. Je me dirigeais donc vers la cuisine pour entamer le rangement et la vaisselle de la cuisine en fredonnant. Je parvenais à merveille à faire comme si de rien était!

Tu ne peux pas résister!!!

Une grande partie du bazar de la cuisine avait déjà été rangé lorsque j'étais sortie de la salle de bain, et pour toute trace de mon maître se trouvait un petit mot sur la table. Je ne savais pas trop si j'étais agréablement surprise ou si j'avais encore plus envie de le frapper -non, je ne le ferais pas, pas la peine d'espérer!-. Tout d'abord, il m'indiquait qu'il été sorti faire du sport, chose plutôt positive car lui aussi devait avoir besoin d'un moment à lui pour remettre ses idées en place, puis ajoutait qu'il avait laissé sa carte bancaire près de l'ordinateur au cas où je voulais faire des achats, je devinais que cela devait avoir un rapport avec sa remarque sur l'absence de décoration de ma chambre: il était vrai que sans trop sortir, je pouvais difficilement faire des achats autrement que par internet et pour cela il me fallait une carte bancaire, chose concrètement difficile à obtenir pour une hybride. Enfin, je trouva un peu troublant qu'il me propose de sortir dans l'après-midi: autant cela permettrait de mettre en avant le fait que le problème de la veille était bien résolu et que nous pouvions à nouveau passer du temps ensemble comme si de rien était, autant je me disais que vouloir passer du temps ensemble pour ensuite être fuyant n'avait pas grand intérêt! ... Mais je me promettais de réfléchir à un lieu de sortie tout de même. Je terminais le rangement de la cuisine, le nettoyage de la vaisselle, ... en attendant le retour de Gabriel. Je fis aussi un rapide tour des placards pour réfléchir à ce que je pouvais préparer pour le déjeuner, désireuse de rattraper le fiasco culinaire de la veille qui n'avait pas été sans conséquences! Il fallait que je prépare quelque chose de bon, et de pas trop épicé cette fois!
Ensuite, je me rendais dans le salon et constatais que la carte bancaire était bien posée à coté de l'ordinateur... Mais je ne savais pas trop quoi en faire. Si il l'avait laissée là, c'était bien qu'il attendait que je l'utilise, mais je n'avais pas grande idée de ce que je pouvais acheter pour décorer ma chambre, à vrai dire la question ne s'était jamais imposée à moi avant puisque je n'avais qu'une modeste cabane qu'il fallait se préparer à devoir quitter à tout moment! J'avais à présent le luxe d'une vraie chambre mais pas beaucoup d'idées sur ce que le chambre d'une jeune fille pouvait bien contenir et, sans doute, si je me lançais à l'aveugle dans la conquête d'internet, j'allais sans doute finir par acheter tout et n'importe quoi! En définitive: une mauvaise idée! Je me laissais tomber sur le canapé, prête à réfléchir sans me laisser influencer par la magie du net. Mais, évidemment, sans support pour me concentrer, ma pensée commençait à dériver. Pourquoi réfléchissais-je? J'étais plutôt bien dans ma chambre telle qu'elle était puisque je n'avais pas vraiment songé par moi-même à la décorer. Là, j'y pensais juste pour faire plaisir à Gabriel parce que l'idée lui était venue d'en parler la veille... Et chercher en vain ce que je pourrais y ajouter ne donnerait sans doute rien. Autant attendre que quelque chose m'attire dans une vitrine, que je pense avoir besoin d'ajouter un objet quelconque dans la pièce -qu'il soit utile ou non-, que je l'évoque au cours d'une discussion, ... Ce serait sans doute mieux que de rester là à essayer d'imaginer ce que je pourrais faire.
Je me décidais à remettre cette mission à plus tard lorsque je pus entendre mon maître entrer dans la maison et traverser en coup de vent le salon en indiquant qu'il allait prendre une douche. Je ne saurais dire si il m'évitait toujours ou si il était juste pressé... Peu être les deux?
Je ne me fis pas remarquer pour autant, songeant au second point évoqué dans le mot qu'il m'avait laissé: je n'avais pas pensé à sa proposition de sortir cet après-midi. Avec ce temps un peu gris, je pouvais me le permettre! Mais le risque de voir tomber la pluie pouvait être gênant, je me disais qu'il fallait sans doute choisir un endroit où nous pourrions facilement nous mettre à l'abri si il se mettait à pleuvoir. Et puis nous étions dimanche, après tout, il n'y aurait peu être pas grand chose à faire en ville... J'espérais qu'il y aurait plus réfléchi que moi.
Ennuyée de ne rien faire, je me dirigeais vers ma chambre en quête de quelque chose pour m'occuper un peu lorsque je croisa le chemin de l'humain qui courrait vêtu d'un simple serviette vers sa propre chambre. Mon réflexe fut alors de me tourner et de faire demi-tour en silence, un peu embarrassée par la situation. Il avait pourtant dit en rentrant qu'il montait prendre sa douche,
je m'étais donc attendue à ce qu'il soit déjà dans sa chambre et donc aucun risque de le croiser et même si j'y avais pensé je ne me serais pas préparée à ce que ce soit dans cette tenue. Dans tous les cas, si il me le demandait,
je n'avais rien vu! ... Ce n'était décidément pas une journée qui s'annonçait facile d'avance! Quelque chose me disait que nous n'étions pas au bout de nos surprises et que d'autres malentendus allaient encore survenir aujourd'hui.

Où allons-nous?!

Je me remettais de mes émotions et remerciais intérieurement Gabriel de ne pas avoir fait plus d'histoire par rapport à notre dernière mésaventure puis, après m'être assurée qu'il était bien monté dans sa chambre cette fois, repris le cours de mes activités c'est-à-dire... Chercher une activité.
J'étais ce genre de personnes qui gardent les prospectus qu'on vous distribue dans la rue... Puis qui jetais le tout d'un coup au bout d'un moment, lorsque la pile était trop grande et les dates largement dépassées. Je feuilletais les derniers en quête, peu être, d'un événement qui aurait lieu aujourd'hui et où nous pourrions aller. Je me rendais alors compte que je ne connaissais pas vraiment ses goûts,
je n'avais pas la moindre idée du genre d'activité qui pourrait lui plaire et y penser me rendait curieuse! Je n'avais pas envie de lui proposer une activité qui ne lui plairait pas et qu'il se sente obligé d'accepter pour me faire plaisir ou je ne sais pour quel autre prétexte... Si nous sortions tous les deux j'avais envie que l'on s'amuse autant l'un que l'autre!
J'entendais l'humain descendre les escaliers et retournais donc le rejoindre dans le salon afin de discuter de nos activités de l'après-midi. Comme je m'y attendais, il me demandait si j'avais une idée de ce que nous pourrions faire, me rappelant que nous avions toute la journée devant nous. D'abord,
il me fit savoir que nous pouvions rester à la maison et regarder des films sur le canapé si je n'étais pas motivée pour sortir. D'autant que les activités manqueraient surement puisque nous étions dimanche. Ensuite, il me proposait différents lieux où nous pourrions aller. J'avais aussi pensé au cinéma mais cela me faisait me poser la question du genre de films qui pourrait nous plaire à tous les deux et je ne savais pas trop... Je ne connaissais pas vraiment les bars et les cafés de la ville, à part les plus mal fréquentés... Un bowling? Je ne me souvenais pas d'y avoir déjà joué mais cela pourrait être amusant -même si je serais ridicule... et de toute évidence il faudrait que je me change si nous choisissions une activité sportive-. Il me proposait aussi d'aller en boîte de nuit ce soir, mais là aussi il s'agissait de lieux que je ne connaissais pas du tout... Il fallait admettre que le coté "joli" de la ville n'était pas celui que je connaissais le mieux!
- Il n'y a pas trop de soleil aujourd'hui, je dois avouer que ça me plairait de sortir... Mais avec tous ces gros nuages ça ne m'étonnerais pas qu'il se mette à pleuvoir et on aura
l'air fins si on a nulle part où s'abriter quand ça commencera à tomber... Et comme nous sommes dimanche les choix sont plus restreints!
Je m'arrêtais pour réfléchir. Si je voulais mener mon plan machiavélique à bien, le cinéma était la meilleure option à prendre... Mais pourquoi tenais-je temps à ce "plan"? Sans doute juste par esprit de compétition parce qu'il me résistait et que je n'aimais pas ça, cela devait faire mal à mon égo. D'un autre coté... Était-ce une bonne idée?
- Je t'avoue que je ne sais pas trop quoi choisir... J'aime bien l'idée du cinéma, mais je n'ai aucune idée de ce qui est diffusé en ce moment. Et toi? Qu'est-ce que tu préfères?
Je voulais aussi lui laisser le choix, en principe c'était même plus à lui de choisir qu'à moi! Finalement,
je me rappelais qu'il avait aussi proposé de sortir ce soir.
- Quant à ce soir, pourquoi pas, mais j'espère que tu connais des endroits sympas parce que moi, ce coté de la ville m'est complètement inconnu!

Où allons-nous?!

Finalement, je n'avais pas apporté grand chose en terme de proposition dans ce débat de "que fait-on aujourd'hui?"... Je n'avais pas su faire preuve de suffisamment d'imagination et n'avait fait qu'écouter et approuver la plupart de ses idées. Je me sentais presque un peu nulle, moi, dans tout ça! Il fallait que je me rattrape, surtout si je voulais attirer son attention. Pas que je le voulais spécialement mais je ne m'en plaindrais pas, enfin peu être, enfin bref. J'avais accepté la sortie mais spécifié que j'avais bien peur que la pluie ne nous tombe dessus et que je ne serais pas ravie de me retrouver trempée à courir en quête d'un abri -une fois de plus, si cela arrive on pourra dire que c'est une tradition!-. Lui n'avait pas l'air de craindre spécialement la pluie, après tout il avait raison et nous n'avions qu'à prévoir le coup pour ne pas se faire mouiller! Il remarquait l'effort que j'avais fait pour me préparer et trouvait dommage d'avoir fait tout ça pour rester à la maison. Je ne savais pas trop si j'étais contente qu'il aie remarqué ou si j'aurai préféré qu'il ne dise rien à ce sujet: je n'avais pas envie qu'il croie que je m'étais faite toute belle pour lui! -même si c'était un peu le cas-. J'avais opté pour le cinéma, c'était un peu cliché mais parfait! Je pouvais même lui laisser le choix du film si il voulait, et peu être que je serais surprise! Il acceptait l'idée, quant aux films nous verrons sur place directement. Sur un éclair de génie, il proposait de prendre des places pour une séance dans l'après-midi, de manger dehors puis de faire un tour en ville avant d'aller voir le film. Cette promenade me donnerait l'occasion de voir un peu le quartier et de décider ce qu'on faisait ce soir. Une journée tous les deux en somme... Plus on avançait, plus cela ressemblait à un premier rendez-vous... Mais ne nous mettons pas dans tous nos états! Nous étions deux adultes consentants qui passaient une journée ensemble en toute amitié sans aucune ambiguïté et d'ailleurs c'était uniquement pour se prouver à nous-mêmes que nous n'étions pas en conflit!
Je tentais d'arrêter de me faire des idées et offrait un sourire avant de répondre:
- Excellent programme, je vais prendre mon manteau et on est partis!
Je trottinais jusqu'à ma chambre, m'emparant de mon manteau sur un cintre accroché à la porte de l'armoire: un vêtement plutôt précieux puisqu'il était coupé de façon à ne pas gêner le mouvement éventuel de mes ailes... Ce qui n'était pas le cas de tous mes vêtements encore... Je l'enfilais en sortant de la chambre, puis me saisissais de la main de l'humain en souriant:
- On peut y aller!