Ludmilla St-Clair ► The red dressed demon | END.

Pour tout vous dire, je ne sais pas grand chose de la vie de Ludmilla, elle est très secrète et déteste parler du passé... Aussi elle n'a jamais voulu me raconter son histoire. Je n'ai pu que mettre bout à bout des éléments sortis au détour d'une conversation ou lors d'une interview ou d'un gala... Et combler du mieux que je pouvais les espaces entre ces évènements. Elle ne vous en dira sans doute pas plus alors je pense que mes notes sont tout ce que vous aurez à son sujet.
Je sais qu'elle est Argentine mais qu'elle n'a jamais mit un pied dans son pays d'origine. Milla est née en France et doit ses origines à son père qu'elle n'a jamais connu, raison pour laquelle elle chérit ces origines. Je pense que si elle veux un jour connaître son pays c'est aussi pour connaître un peu de cet homme. Sa mère n'était pas un modèle, après avoir perdu son mari on peut le comprendre... A ce que j'ai cru comprendre, elle n'était pas seulement démissionnaire: elle se disait incapable d'aimer cet enfant. Elle lui reprochait sans doute son chagrin. Ludmilla a trouvé une figure maternelle en la personne de sa grand-mère, qui était chapelière. Ca, je le sais car le chapeau rouge que porte Ludmilla est un souvenir de la femme qui l'a élevée. Elle me l'a dit lorsque je lui ai demandé pourquoi s'efforcer de garder une telle vieillerie en état au lieu d'acheter un nouveau chapeau... Elle était très fâchée ce jour-là.
C'est sa grand-mère qui lui a donné l'amour de la mode, elle avait décidé de suivre le même chemin qu'elle. Elle a quitté ce monde alors que Milla avait treize ans. C'était une enfant intelligente et elle avait comprit depuis longtemps que la pauvre femme était malade. Le plus dur fut de retourner chez sa mère. Cela ne dura pas longtemps, elles étaient toujours en conflit alors Milla décida d'elle-même de partir en pension.
Pour suivre son rêve, Milla entra au lycée dans un cursus de design où elle se passionna pour l'histoire de l'art. Ses études, elle en parle bien plus facilement que ses relations conflictuelles avec sa mère! Elle s'intéressait à beaucoup de choses, et alors qu'elle se destinait à la mode c'est le domaine de la bijouterie qui l'attira le plus. La création de René Lalique l'inspiraient, aussi choisit-elle une école de bijouterie pour poursuivre ses études.
L'école fut le lieux de ses premières expériences sentimentales, elle était songeuse lorsqu'elle m'en parlait mais je ne voulais pas lui poser plus de questions! Toujours était-il que son projet de fin d'étude attira la curiosité d'un grand créateur dont je n'arrive jamais à me souvenir du nom... Il faut dire qu'il est ridiculement compliqué. Ce créateur devint le mentor de Ludmilla et lui permit de créer sa première collection il y a trois ans. Elle remporta un grand succès. C'est à cette époque que je fis sa connaissance. Milla comprit vite que s'entourer de gens influents lui ouvrirait des portes et, moi aussi, je venais de percer dans mon domaine. L'année suivante, elle mena sa barque seule pour une nouvelle collection. Elle en fit la promotion à la télévision, s'affichait au bras de grandes stars...
Et là, sans que l'on ne s'en rendre compte, quelque chose se brisa chez elle. Je ne pus jamais savoir ce qui avait provoqué ce changement... Elle ne parvint plus à créer quoi que ce soit, la frustration la rendit aigrie, elle ne voulut plus voir personne et n'acceptait plus de sortir que pour se montrer un peu en public et entretenir le mythe autours de sa personne. Elle n'était plus qu'un robot qui "faisait son travail" et refusait tout contact humain qui ne lui soit pas utile. Je m'acharnais pour faire exception mais cela ne marcha pas bien longtemps. Elle s'enterrait dans un mutisme que je ne comprenais pas.
Jusqu'à il y a six mois.
Elle m'avait fait venir chez elle pour m'annoncer qu'elle partait. On lui proposait une place de guest dans une émission sur les jeunes créateurs à Nekaï. Elle disait que ce voyage pouvait lui permettre de retrouver l'inspiration mais j'étais sur qu'il y avait autre chose derrière tout ça.
Elle partait à l'autre bout du monde, et je ne pouvais rien faire pour l'en empêcher si ce n'était profiter des derniers jours qu'elle m'offrait de passer en sa compagnie. Elle m'avait interdit de la suivre car j'avais ma propre barque à mener... Alors j'allais l'attendre en espérant qu'elle me revienne. D'un coup, je me sentais faible. Qu'est-ce qui me retenait de briser l'interdit? Peu être la peur de découvrir l'autre raison qui la poussait à me quitter.